Laïla Mernissi
Doctorante en Philosophie. Université Toulouse Jean-Jaurès, laboratoire ERRAPHIS.
Sa thèse porte sur le statut paradoxal du rêve dans la philosophie de Gilles Deleuze.
Résumé et axes de recherche :
« L’épreuve du rêve comme unité du monde - où chaque système individuel se défait au profit d’un univers dans lequel on est toujours un élément dans le rêve de quelqu’un d’autre - « je n’aime pas appartenir au rêve d’une autre personne » ». (Logique du sens, p. 97)
Il s’agira, pour nous, de démontrer le statut paradoxal - à contre-courant et dédoublé - du phénomène onirique dans le corpus deleuzien, sous ses formes multiples.
Aussi, est-ce, à partir de fragments épars, mêlant éléments « ontologiques » (le possible et le virtuel, réel et imaginaire, philosophie du temps ) , psychanalytiques (le rêve oedipien / rêves et délires du schizophrène) , scientifiques (cerveau et physiologie du rêve), historiques (histoire monumentale et montage organique, Rêve américain), géographiques, géologiques (L’île déserte et la rêverie entre séparation et fondation), politiques (l’u-topie, a-topie, dé-topie), mythiques (rêves et visions prophétiques), économiques (rêve, désir et capitalisme) et artistiques (le Voyant en littérature, l’image-rêve, l’image-monde au cinéma), que se construira une image de rêve proprement deleuzienne, qui nous semble tout à fait opératoire, apte à saisir la posture complexe du rêveur, spécifique au monde contemporain. « La dramatisation se fait dans la tête du rêveur, mais aussi bien sous l’oeil critique du savant » (DR, 282).
Ces différentes acceptions du rêve correspondent les unes avec les autres tout au long de l’oeuvre ; rappels et répétitions toujours différenciés, visions anamorphiques. Une stabilité du concept difficile à trouver mais assurée par des liens imperceptibles que nous devrons mettre en évidence. Et si la condamnation du rêve, comme instance de jugement ou mot d’ordre, mais aussi comme structure organique unificatrice, semble prédominer dans l’oeuvre (à contre-courant), il n’en demeure pas moins que le rêve revêt d’autres aspects plus positifs, surprenants de par leur nouveauté absolue (dédoublement) : le rêve de l’insomnie, qu’il s’agit de créer et d’expérimenter (L’épuisé, Critique et clinique p. 163)
Notre dessein donc est de parvenir à saisir la chimère, toujours fuyante, d’en comprendre la composition et le fonctionnement. Décentrer notre regard sur une notion marginale, pour en révéler, toutefois, la nouveauté, et construire, dès lors, une logique du rêve avec et grâce à Deleuze.