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Isabelle Hanquart

Docteure en Philosophie. Université Toulouse Jean-Jaurès, laboratoire ERRAPHIS.

Sage-femme

 

isabelle.hanquart@hotmail.fr

 

Sujet de thèse : Logique de la souffrance chez Nietzsche

Résumé 

La question de la souffrance s’inscrit en filigrane tout au long de l’œuvre nietzschéenne et se tisse avec toutes les notions fondamentales de la pensée du philosophe, grand expérimentateur de la souffrance. Le rapport à la souffrance est un symptôme majeur du rapport à l’existence, c’est pourquoi il est aussi un critère d’évaluation des individus et des peuples, il signe l’orientation de leur volonté de puissance. Le projet de transvaluation des valeurs s’enracine dans une mise en perspective de la civilisation occidentale chrétienne eu égard à la civilisation grecque ancienne ; aux antipodes de l’instinct de comparaison, l’auteur recourt à la méthode généalogique et repère le pivot opérant ce passage de l’une à l’autre. De la tragédie grecque - où l’art se met au service de la vie afin d’accepter les aspects insupportables du destin - à l’Europe contemporaine où un profond ressentiment est à l’œuvre, nous observons une modification radicale de logique de souffrance. Interroger ce changement de paradigme via le rapport aux épreuves inhérentes à la vie, met en exergue deux logiques antinomiques : soit la souffrance est admise et devient un ressort de l’existence, soit elle s’appréhende comme un seul pâtir nécessaire à la rédemption des âmes.

Analyser comment les Grecs ont abandonné leur pessimisme dionysiaque au profit d’une quête d’absolus promettant l’abolition des souffrances dans un arrière-monde, établit le diagnostic d’un affaiblissement, donc révèle une volonté de puissance en déclin. Il ne s’agit point d’observer une prescription morale mais de guérir de la maladie européenne par une voie à la fois distanciée de la morale et créative. Une nouvelle politique de l’agir consisterait alors à interpréter le texte de l’existence en injectant du sens à sa part essentielle de souffrance afin de se surmonter ou se renforcer. Davantage cela implique de reconnaître l’impossible dissociation de la souffrance et de la jouissance et présume que l’homme a d’ores et déjà à deviner les conditions de sublimation de la souffrance s’instaurant uniquement dans un agir créateur du devenir. Si le pivot socratique s’avère être l’erreur de vouloir réformer l’existence, le christianisme l’accentue en suscitant une perversion des esprits sous des masques de vertus. La tâche du philosophe médecin est alors d’inverser ce pivot afin de préparer la transvaluation des valeurs. Sonder les valeurs morales issues du socratisme et du christianisme en fonction de leur rapport à la souffrance constitue donc une première étape de ce long processus. Transfigurer les expériences tragiques revient à créer un nouveau paradigme d’existence conditionné par un pâtir et un agir concomitants qui conjuguent volonté de puissance et éternel retour. La question de la souffrance pose alors de novo le  problème de l’esthétisation de l’existence.

 

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